vendredi 9 janvier 2015

Je ne suis pas Charlie

par José Antonio Gutiérrez D., 7-1-2015. Traduit par Santiago Perales, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala
Original:
Je ne suis pas Charlie (Yo no soy Charlie)

José Antonio Gutiérrez D.  est un militant libertaire colombien résidant en Irlande où il participe à des mouvements de solidarité avec l'Amérique latine et la Colombie, il collabore à la revue CEPA (Colombie) et à El Ciudadano (Le Citoyen, Chili) ,il collabore également au site web international www.anarkismo.net et au site La Pluma. Auteur de "Problèmes et possibilités de l'anarchisme" (en portugais, Faisca ed, 2011) et coordinateur du libre "Origines libertaires du Premier mai en Amérique latine"(Quimantu ed 2010).
Je tiens à clarifier d'emblée que je considère l'attentat contre les bureaux du journal satirique Charlie-Hebdo à Paris comme une horreur et que je ne crois pas qu'il soit justifiable en quelque circonstance que ce soit, de convertir un journaliste, si douteuse que soit sa qualité professionnelle, en objectif militaire. Cela vaut en France, comme en Colombie ou en Palestine.
Je ne m'identifie non plus avec aucun fondamentalisme, ni chrétien, ni juif, ni musulman, ni non plus avec le laïcisme bébête francisé, qui érige la "République" sacrée en déesse. J'apporte ces précisions, qui sont nécessaires puisque les gourous de la haute politique en Europe nous assurent que nous vivons dans une "démocratie exemplaire" avec des "grandes libertés", même si nous savons bien que  Big Brother  nous surveille et que n'importe quel discours hors cadre toléré se voit durement puni. Mais je ne crois pas qu'une condamnation de l'attentat contre Charlie Hebdo doive entraîner automatiquement qu'on porte aux nues une publication qui est, fondamentalement, un monument d'intolérance, de racisme et d'arrogance coloniale.
Des milliers de personnes, affectées par cet attentat –ce qui est compréhensible -, ont fait circuler des messages disant "Je suis Charlie" comme si ce message était le dernier cri de la défense de la liberté. Eh bien, je ne suis pas Charlie. Je ne m'identifie pas à la représentation dégradante et "caricaturale" qu'il fait du monde islamique, en pleine "Guerre contre le Terrorisme", avec toute la charge raciste et colonialiste que celle-ci comporte. Je ne peux pas voir d’un bon œil cette agression symbolique constante qui va de pair avec une agression physique et réelle, au moyen de bombardements et d'occupations militaires, dans les pays appartenant à cet horizon culturel. Je ne peux pas non plus voir d'un bon œil ces caricatures et ces textes offensants, quand les Arabes font partie des secteurs les plus marginalisés, appauvris et exploités de la société française, qui ont historiquement subi un traitement brutal : je n'oublie pas que c’est à Paris, au début des années 60, que la police a massacré à coup de matraques 200 Algériens qui demandaient la fin de l'occupation française de leur pays, déjà responsable selon les estimations d'un million de morts d'Arabes "barbares". Il ne s'agit pas de caricatures innocentes, œuvres de libre penseurs, mais de messages, produits par les médias de masse (car, bien qu’ayant une posture alternative, Charlie Hebdo appartient bien aux médias de masse), chargés de stéréotypes et de haine, renforçant un discours qui considère les Arabes comme des barbares à contenir, déraciner, contrôler, réprimer, opprimer et exterminer. Des messages dont le but implicite est de justifier les invasions des pays du Moyen-Orient ainsi que les multiples interventions et bombardements orchestrés par l'Occident, dans la défense du nouveau partage impérial. L'acteur espagnol Willy Toledo disait, dans une déclaration polémique – qui ne faisait qu'énoncer une évidence - que "l'Occident tue tous les jours. Sans bruit". Et c'est cela que Charlie et son un humour noir cachent sous forme de satire.
Je n'oublie pas la couverture du N°1099 de Charlie Hebdo, dans lequel on banalisait le massacre de plus de mille Égyptiens par une dictature militaire brutale, qui a la bénédiction de la France et des USA, avec un dessin d'un homme musulman criblé de balles, tandis qu'il essayait de se protéger avec le Coran, avec ce texte : "Tuerie en Égypte. Le Coran c'est de la merde : il n'arrête pas les balles". Certains auront trouvé ça d’amusant. En leur temps, des colons anglais en Terre de Feu (Argentine) trouvaient amusant de poser pour des photographies avec des indigènes qu'ils avaient "chassé", avec de larges sourires, carabine à la main, et avec le pied posé sur cadavre sanguinolent toujours chaud. Plutôt qu’amusante, cette caricature me semble violente et coloniale, un abus de cette liberté de presse occidentale aussi fictive que manipulée. Qu'est-ce qui arriverait si je publiais aujourd'hui  journal avec en couverture la phrase : "Tuerie à Paris. Charlie Hebdo, c’est de la merde : ça n'arrête pas les balles") et une caricature du défunt Jean Cabut criblé de balles avec une copie du journal entre les mains ? Bien sûr, ce serait un scandale : la vie d'un Français est sacrée. Celle d'un Égyptien (ou d'un Palestinien, Irakien, Syrien, etc.) c'est du matériau "humoristique". C'est pourquoi je ne suis pas Charlie, puisque la vie de chacun de ces Égyptiens criblés de balles est pour moi aussi sacrée que celle de n'importe quel de ces caricaturistes aujourd'hui assassinés.
Nous connaissons déjà ce deux poids deux mesures : on va avoir droit à des discours de la défense de la liberté de presse de la part des mêmes pays qui, en 1999, ont donné la bénédiction au bombardement de l'OTAN, à Belgrade, de la station de TV publique serbe qualifiée de "ministère de mensonges", ou qui se sont tus quand Israël a bombardé à Beyrouth la station de TV Al-Manar en 2006, qui taisent les meurtres de journalistes critiques colombiens et palestiniens. Après la belle rhétorique de la liberté, viendra l'action liberticide: plus de maccarthysme au nom de l' "anti-terrorisme", plus d'interventions coloniales, plus de restrictions à ces "garanties démocratiques" en voie d'extinction, et naturellement, plus de racisme. L'Europe se consume dans une spirale de haine xénophobe, d'islamophobie, d'antisémitisme (les Palestiniens sont de fait des sémites) et cette atmosphère devient de plus en plus irrespirable. Les musulmans sont déjà les juifs de l'Europe du XXIème siècle, et les partis néo-nazis redeviennent respectables  80 ans plus tard, grâce à ce sentiment répugnant. Pour tout cela, malgré la répulsion que provoque en moi l'attentat de Paris, Je ne suis pas Charlie.

2 commentaires:

  1. J'ai honte pour ce que tu as écrit... tu es un connard

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  2. Zionist Point "Charlie 2.0" et son arme redoutable et vicieuse ["شارلي 2.0" الصهيونية و سلاحها الفتاك ألخبيث] 19 Jan 2015
    http://www.tortillaconsal.com/albared/node/5142

    Zionist Point "Charlie 2.0" et son arme redoutable et vicieuse ["شارلي 2.0" الصهيونية و سلاحها الفتاك ألخبيث]

    Image ci-contre: Bernard-Henri LEVY peut dire aussi: "Je suis Charlie". Lui, comme ce journal, sans parler des personnages bien connus à ses côtés, ont tous participé, d'une manière ou d'une autre, aux guerres de l'OTAN, notamment celle contre la Jamahiriya Libyenne et la Syrie, lesquelles ont causé la mort d'un demi-million de personnes. C'est avant tout le climat social créé en France par ces guerres (le bombardement de la Jamahiriya a duré sept long mois) qui explique la "mobilisation" hystérique et quasi religieuse organisée par le pouvoir autour du mantra "Je suis Charlie".



    Note: s'agissant d'un événement qui a mobilisé l'opinion mondiale, un court résumé est d'abord proposé dans quelques langues de communication.

    Résumé: L'opération française "Charlie" pose la question fondamentale des usages de la pornographie mondialisée, laquelle est de fait devenue une arme néocoloniale et néo-orientaliste de domination au service de l'impérialisme et du sionisme. A son contact, le "Choc des Civilisations" des Néoconservateurs étatsuniens devient nécessité. L'incroyable précédent tunisien méconnu de cette affaire est évoqué. Cependant, grâce au parrainage de l’Etat français, les millions d'exemplaires de "Charlie 2.0" (14 janvier 2015) permettront paradoxalement au public, ignorant jusqu'alors du contenu en question, de prendre la mesure de la manipulation totalitaire de la "liberté d'expression" et de la laïcité en France. Liberté sexuelle, oui. Pornocratie, non!

    English: French "Operation Charlie" poses the key question of how global porn is used and how it has has actually become a neo-colonial neo-orientalist weapon in the hands of imperialism and zionism. Upon contact, the so-called "Clash of Civilizations" put forward by US Neoconservatives suddenly becomes a necessity. The incredible Tunisian precedent of this case is mentioned. However, thanks to open sponsoring by the French State, millions of copies of "Charlie 2.0" (14 January 2015) will paradoxically allow the broad public (so far unaware of the very content of the journal) to get the full measure of the totalitarian manipulation of "freedom of speech" and secularism in France. Sexual freedom, yes. Pornocratic power, never!

    Espanol: La operacion francesa "Charlie" plantea la cuestion fundamental de los usos de la pornografia la cual ha vuelto a ser un arma neocolonial y neo-orientalista para la dominacion al servicio del imperialismo y del sionismo. A su contacto, el "Choque de las Civilisaciones" de los Neoconservadores estounidenses vuelve a ser una necesidad. Poca gente conoce el increible precedente tunecino de este asunto. Ahora, y de manera paradojica, el patrocinio del Estado frances a la publicacion (14 de enero del 2015) de unos tres miliones de ejemplares de "Charlie 2.0" permitira sin embargo al publico (ignorante hasta hace poco del contenido real de la revista) de tomar la medida real de la manipulacion totalitaria de la "libertad de expression" y de la laicidad en Francia. Libertad sexual, vale. Pornocracia, jamas!

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