mardi 5 avril 2011

Appel : Urgence d’un moratoire sur les renvois vers la Tunisie, et d’un accueil digne des Tunisien.ne.s dans l’UE !

http://www.migreurop.org/article1879.html

4 avril 2011 
Depuis deux mois, la Tunisie subit des pressions considérables, notamment de la part de l’Italie, pour renforcer les contrôles à ses frontières et réadmettre ses ressortissants arrivés à Lampedusa. La visite de Silvio Berlusconi ce 4 avril a pour objet d’obtenir des engagements des autorités tunisiennes en ce sens, malgré les appels répétés des organisations de défense des droits des migrants (Migreurop, 22 Février, Mare Nostrum, 2 Mars et REMDH, 23 Mars) et en dépit de la situation exceptionnelle à laquelle le pays doit faire face.
La Tunisie vit des moments historiques et doit relever les défis considérables en termes de construction démocratique. La situation est porteuse d’immenses espoirs mais elle est complexe et rendue particulièrement difficile par la guerre en Libye. La Tunisie a accueilli depuis le début de la crise libyenne plus de 200 000 personnes, soit dix fois plus que l’Italie. Si la majorité des personnes arrivées en Tunisie ont pu être rapatriées vers leur pays d’origine, des milliers d’entre elles sont toujours bloquées dans les campements à la frontière, ne pouvant rejoindre leur pays en guerre, comme c’est le cas pour la Côte d’Ivoire, Érythrée et la Somalie.
Il est hypocrite et immoral de la part de l’UE de se réjouir de la révolution en Tunisie tout en exigeant que celle-ci continue, au nom de la supposée nécessité de protéger l’Europe d’un « déferlement migratoire », à jouer le rôle de garde frontière, comme du temps de la dictature de Ben Ali. Il est urgent au contraire de prendre acte des changements démocratiques et de reconstruire les relations entre l’UE et la Tunisie sur des bases équitables et transparentes. Les États européens ne peuvent pas répondre au processus démocratique en cours par une politique répressive à l’égard des migrant.es, en faisant peser la menace d’un renvoi collectif.
Non seulement cette menace doit être levée, mais les États de l’UE ont la responsabilité d’accueillir dignement celles et ceux qui sont arrivé.e.s en Europe ces dernières semaines. Depuis plus d’un mois, l’arbitraire et l’incohérence caractérisent la gestion de la situation par le gouvernement italien. Le traitement qui est réservé aux Tunisien.n.es dans certains centres de rétention en Italie, la chasse aux migrants dans le sud de la France et le jeu de « ping-pong » dont d’autres sont l’objet à la frontière franco-italienne sont inacceptables.
Il est enfin inadmissible que l’Union Européenne laisse à la Tunisie la seule responsabilité de l’accueil des personnes fuyant la Libye et qui n’ont pas la possibilité de rentrer dans leur pays. L’Union Européenne a le devoir de se montrer à la hauteur de la situation, en prenant exemple sur l’accueil offert par la Tunisie à toutes les personnes fuyant la Libye.
Une situation exceptionnelle appelle des mesures exceptionnelles, et l’UE dispose de tous les outils juridiques et politiques pour y faire face. Les États membres doivent sans plus attendre prendre leurs responsabilités et :
• Déclarer un moratoire immédiat sur les renvois de Tunisien.e.s en Tunisie ;
• Accorder l’admission exceptionnelle au séjour des Tunisiens déjà arrivés en France et en Italie
• Garantir l’accès au territoire européen aux personnes en quête de protection et s’abstenir de toute mesure ou accord qui pourraient l’entraver ;
• Mettre en œuvre le dispositif permettant d’accorder la protection temporaire prévue par la directive du 20 juillet 2001 à tou.te.s celles et ceux qui peuvent s’en prévaloir ;
• Accueillir, dans le cadre de la réinstallation, les réfugié.e.s présent.e.s à la frontière tuniso-libyenne qui le souhaitent ;
• Offrir l’asile ou une protection à toutes les personnes qui ne peuvent être rapatriées du fait de la situation dans leur pays d’origine.
A court terme, il importe de mettre en place un programme européen d’aide et de coopération avec la Tunisie qui permette à ses ressortissant.es d’entrer régulièrement dans les États membres pour y travailler ou y faire des études.
Signataires : ABCDS (Ma), ACORT (F), APDHA (ES), ARCI (I), ASGI (I), ATMF (F), CIRE (B), FTCR (F), GADEM (Ma), GISTI (F), La Cimade (F), Migreurop, LDH (B), SOS Racismo (Es)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire