vendredi 25 septembre 2009

Honduras: le début de la fin ?

English: Honduras: The Beginning of the End?

Zelaya est déjà à Tegucigalpa et son entrée au Honduras, se moquant des « mesures de sécurité » frontalières, devrait marquer le début de la fin du régime putschiste. Cet espoir est fondé sur plusieurs raisons, exposées ci-dessous.

Premièrement, parce que les gorilles du Honduras et leurs instigateurs et protecteurs aux USA (principalement au Commandement Sud et au Département d’État) ont sous-estimé la massivité, l'intensité et la persévérance de la résistance populaire qui, jour après jour, sans faille, manifeste son opposition au coup d’Etat. En réalité, ce refus de taille n’était prévu par personne si on s’en tient à l’histoire contemporaine du Honduras. Mais le nouveau chemin choisi par Zelaya, sa réponse positive face aux demandes populaires longuement reportées et la réorientation de son insertion internationale dans le cadre de l’ALBA, a eu un effet pédagogique impressionnant et a déchaîné une réaction populaire inespérée.

Deuxièmement: le régime putschiste s'est montré incapable de briser son double isolement. Sur le front interne, il est devenu de plus en plus évident que sa base sociale se réduisait à l’oligarchie et à quelques groupes subordonnés à son hégémonie, dont les moyens de communication dominés sans contrepoids par le pouvoir du capital. De plus, le passage du temps, loin de débiliter la résistance populaire, a affaibli le soutien social au régime. 
Sur le plan international, l’isolement de Micheletti et de sa bande est quasi absolu, sauf de rares exceptions. Toute l’Amérique Latine et les Caraïbes ont retiré leurs ambassadeurs. De même plusieurs des pays les plus importants d’Europe. Même l’OEA a adopté une ligne dure à l’encontre du régime. Son soutien externe provenait presque uniquement des USA. Néanmoins, ce soutien a diminué avec le temps, depuis le refus de visas au corps diplomatique accrédité à Washington jusqu’à des mesures toujours plus exigeantes à l’encontre de Micheletti lui-même et de ses collaborateurs.

Troisièmement, parce que la politique ambigüe du gouvernement US - résultant d’une confrontation interne dans l’administration - a facilité le coup d’Etat qui a pu évoluer dans une direction contraire aux intérêts des usurpateurs. Certes, le rejet initial du coup d’Etat manifesté par Obama fut par la suite atténué et attiédi par son ancienne (et actuelle ?) rivale, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton. Mais le caractère rétrograde de Micheletti et de son entourage - qu’ils ne peuvent dissimuler - ainsi que l’interminable quantité d’insultes adressées à Obama chaque fois que la Maison Blanche exprimait une critique à Tegucigalpa, a lentement fait pencher la balance contre la Secrétaire d’État. Ce qui a créé une atmosphère croissante d'antagonisme dans les relations avec les putschistes.

Quatrièmement et enfin : le régime instauré le 28 juin constitue une sérieuse prise de tête pour Obama.


En premier lieu, il dément manifestement sa promesse de fonder une nouvelle relation entre les USA et les pays de l’hémisphère. Le soutien initial au putsch, clairement manifesté par la résistance obstinée de Washington à le caractériser comme un « coup d’Etat », la tiédeur de la réponse diplomatique et l’indifférence face aux graves violations des droits humains perpétrées par le régime de Tegucigalpa, tout cela a nui sérieusement à l’image qu’Obama voulait établir en Amérique Latine et dans les Caraïbes.

La continuation du régime putschiste ferait apparaître Obama comme un politicien irresponsable et démagogue ou, pire encore, comme quelqu’un d’incapable de contrôler ce que font et disent ses subordonnés au Pentagone, au Commandement Sud et au Département d’État. Ceci se rattache à une autre affaire, très importante et qui dépasse le cadre de la politique de l’hémisphère : sa crédibilité sur l’arène internationale. S'il s'avère impuissant à contrôler ce qui se passe dans son « arrière-cour », les gouvernants d’autres pays - spécialement la Chine, la Russie et l’Inde - auraient des raisons de suspecter qu’il ne pourra non plus contrôler les secteurs les plus belliqueux et réactionnaires des USA. Pour ceux-ci, les promesses du président d’encourager le multilatéralisme équivalent à une capitulation inconditionnelle face à leurs ennemis détestés.
Ceci est particulièrement grave dans une période où Obama négocie avec la Russie un nouvel accord pour réduire l’arsenal nucléaire des deux pays, ce dont Washington a besoin autant que Moscou, étant donné l’hémorragie économique produite par les guerres en Irak et Afghanistan et l’incontrôlable déficit fiscal usaméricain.
L’échec de cet accord aurait un coût économique énorme sur le budget public au moment où cet argent est nécessaire pour éloigner les risques d’un approfondissement de la crise économique qui a éclaté en 2008. Mais pour persuader les Russes que son plan de réduction d’armements est viable, il doit d’abord démontrer qu’il contrôle la situation et que ses faucons au Pentagone ne le lâcheront pas.
Chaque jour de plus avec Micheletti au pouvoir équivaut à un mois supplémentaire de conversations difficiles avec Medvedev et Putin pour les convaincre que ses promesses seront tenues. Parce que s’il ne peut maîtriser les siens au Honduras, pourra-t-il le faire lorsqu’il s’agira d’une question stratégique et vitale pour la sécurité nationale des USA ?

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